Béla Tarr Rétrospective intégrale

en présence du cinéaste

[Cinéma]

Cette semaine :

Vendredi 16 décembre
19h30, Cinéma 1
Les Harmonies Werckmeister, 2000, 145’
Samedi 17 décembre
14h30, Cinéma 2
Macbeth, 1982, 64’,16h, Petite salle Table ronde autour du cinéma de Béla Tarr avec Kristian Feigelson, András Kovács, Sylvie Rollet et Jarmo Valkola, 18h30, Cinéma 2 Rapports préfabriqués, 1982, 82’, 20h, Cinéma 1 L’Outsider, 1979-1980, 135’
Dimanche 18 décembre
14h, 17h et 20h (trois parties), Cinéma 2 Satantango, 1990-1994, 435’
Lundi 19 décembre
19h30, Cinéma 2
Tarr Béla, cinéaste et au-delà, de J.-M. Lamoure, env. 45’,Le jour où le fils de Raïner s’est noyé, de A. Vernhes-Lermusiaux, 2011, 15’
séance présentée par les réalisateurs
Jeudi 22 décembre
19h30, Cinéma 1
Almanach d’automne, 1983-1984, 120
Vendredi 23 décembre
19h30, Cinéma 2
Hotel Magnezit, 1978, 13’ Le Nid familial, 1977, 100’


Cinéaste d’un temps réinventé, orfèvre perpétuellement traversé par la question de la condition humaine, chercheur invétéré des fondements du monde, Béla Tarr a façonné en neuf longs métrages, quatre courts métrages et un film pour la télévision, une oeuvre radicale et visionnaire, à la beauté formelle fascinante. Né à Pecs en 1955, il se voit refuser l’accès à l’université après avoir réalisé, avec la caméra Super 8 offerte par son père, son premier film amateur, jugé dissident dans la Hongrie communiste de l’époque. D’abord ouvrier de la réparation navale, dit-on, Béla Tarr sort diplômé de l’École Supérieure du Théâtre et du Cinéma de Budapest, débute sa carrière à la fin des années 80 par une trilogie sociale, fortement influencée par le cinéma direct et le travail du Studio Béla Balazs, dont il fait un temps partie. Nid Familial, L’Outsider et Rapports préfabriqués composent ainsi une vision saisissante de la réalité socialiste, dont les plus proches échos pourraient être certains films de Cassavetes et Tarkovski. Après une adaptation de Macbeth pour la télévision, en 1982, composée de seulement deux plans, soixante-sept minutes durant, Béla Tarr affirme son élégance de la mise en scène à travers une seconde trilogie, composée de Damnation, du film-fleuve Satantango et de son film le plus connu à ce jour, Les Harmonies Werckmeister, tous écrits avec l’aide du romancier hongrois Laszlo Krasznahorkai. Maîtrise du plan séquence, composition d’un noir et blanc magique et captivant,

refus de la prédominance de la narration, le cinéma de Béla Tarr pénètre la beauté du monde avec une fulgurance emprunte d’ironie. On retrouve dans L’Homme de Londres, réalisé en 2007, à partir d’une oeuvre de Simenon, ce même désespoir incandescent. L’oeuvre de Béla Tarr se place au confluent des sciences sociales, de la littérature, du théâtre, de la peinture, de la musique et du cinéma. Une oeuvre encore méconnue en France, qui compte pourtant de nombreux admirateurs et connaisseurs à travers le monde, de l’écrivain Susan Sontag au critique Jonathan Rosenbaum, en passant par les comédiens Tilda Swinton et Michael Lonsdale ou encore les cinéastes Gus Van Sant, Jim Jarmusch et Guy Maddin. Comme l’analyse Émile Breton, dans le numéro 3 de la revue Cinéma, daté de septembre 2002 : « On ne peut pas dire que les films de Béla Tarr, du Nid familial et ceux qui le suivirent, situés sous le socialisme, aux Tango de Satan et Les Harmonies Werckmeister postérieurs à sa chute, fassent preuve d’un optimisme excessif quant à l’avenir de l’humanité. Reste pourtant ceci : tous, quels qu’ils soient, procèdent d’une telle jubilation dans l’invention d’une écriture à la hauteur de leur sujet profond, qu’il y a toujours de l’allégresse à les voir ou les revoir.
L’impression qu’ils ont été tournés dans la joie ». À l’occasion de la sortie en France de son film inédit, que le cinéaste annonce lui-même comme le dernier, Le Cheval de Turin, récompensé par l’Ours d’Argent, Grand Prix du Jury, ainsi que par le prix FIPRESCI, Prix de la Critique Internationale, au 61e Festival de Berlin, c’est ce sentiment de joie à la fois limpide et sombre que convoquent le Centre Pompidou et le Festival d’Automne. Cet événement exceptionnel, accompagné par Béla Tarr lui-même, permettant la découverte de l’intégralité des oeuvres du cinéaste, sera complété par une Master Class, au Centre Pompidou, le samedi 3 décembre 2011.
À paraître : ouvrage sur Béla Tarr par Jacques Rancière, Le temps d'après (Éditions Capricci - 29 novembre 2011)