Young Jean Lee STRAIGHT WHITE MEN

[Théâtre]

Que se passe-t-il lorsque l’on perd le plus grand des privilèges : celui d’oublier que l’on est privilégié ? Cette question inattendue est le point de départ de STRAIGHT WHITE MEN, qui aborde cette figure de l’homme blanc hétérosexuel devenue la « voix par défaut » de nos sociétés occidentales. Comme un écho lointain à Mort d’un commis voyageur d’Arthur Miller, qui explorait les conflits moraux d’une famille de la classe moyenne blanche dans l’Amérique de l’après-guerre, STRAIGHT WHITE MEN met en scène une famille ordinaire composée d’un père et de ses trois fils déjà adultes. Alors que l’un d’eux remet en question sa position et s’oppose aux attentes de sa famille, ce sont les valeurs dominantes des sociétés néolibérales contemporaines qui sont interrogées – et notamment leur tendance à faire de la réussite personnelle un objectif universel, de l’individualisme une morale, du soi une entité à modeler et à construire…
À l’image de son héros moyen, la pièce de Young Jean Lee adopte certains codes théâtraux conventionnels pour en faire ressentir toute l’étrangeté et l’artificialité. Pour cette metteure en scène et dramaturge d’origine coréenne, figure centrale de la scène théâtrale new-yorkaise, il s’agit également de poser la question de l’identité sous toutes ses formes – qu’elle soit ethnique, sociale ou sexuelle – dans une société qui ne cesse de l’exalter sans pour autant en penser les contradictions ni définir les conditions d’un véritable vivre ensemble.