Nono/Neuwirth/Maderna/
Pesson/Kurtág/Knox/
Tamestit/Holliger Für Paul Dessau, Ständchen für Tini...

[Musique]

« Voyageurs, il n’y a pas de chemins, il faut marcher ». Ces mots inspirèrent à Luigi Nono un ultime cycle dont le concert du 9 octobre présente le dernier volet. Garth Knox s’inscrit dans ses échos et ses pas : tout voyageur est en quête, cherche, au risque de l’erreur, et se met à l’écoute du monde. Ce n’est pas une marche, mais un galop, une course à l’abîme, à laquelle nous convie Gérard Pesson dans Paraphernalia. De brèves figures en écho s’accumulent, « s’échauffent en dévalant leur pente, jusqu’à atteindre, comme une toupie fusionnant ses couleurs en un gris acide et vengeur, la foudroyante lenteur des choses rapides ». Une seconde idée préside au choix des œuvres de ce concert. Dans les dernières partitions de Nono, les manuscrits portent souvent non l’indication d’une voix ou d’un instrument, mais les initiales d’un instrumentiste ou chanteur. Ce tissu de relations humaines et d’amitiés est celui des compositeurs comme des trois interprètes de ce concert : Antoine Tamestit qui est rejoint ici par Garth Knox et Carolin Widmann. Toujours, l’œuvre se fait avec l’autre. Et toujours, elle est une adresse à l’ami, la compagne, l’enfant, celui qui joue ou qui écoute… Für Paul Dessau (Pour Paul Dessau) rend ainsi hommage à ce compositeur est-allemand qui collabora avec Bertolt Brecht et Heiner Müller : « Rencontres, nouvelles connaissances et amitiés, rapports de travail, discussions parfois âpres, et pas seulement à la cantine du Berliner Ensemble », écrivait Luigi Nono. Dans ce cercle de l’amitié, Olga Neuwirth renoue ici avec Antoine Tamestit, pour qui elle avait écrit en 2009 Remnants of Songs… an Amphigory, en composant cette fois, pour lui, une œuvre pour alto solo.
Bruno Maderna partageait cette même attention à autrui, souvent dans un cadre familial : Ständchen für Tini (Aubade pour Tini) est une miniature délicate, composée « par papa » pour l’album de famille, et d’une simple tendresse – Maderna y déploie cette mélodie absolue qu’il entendait vibrer depuis la Grèce ancienne. L’œuvre de György Kurtág est pareillement traversée de phrases qu’il envoie aux amis, aux disparus, à ceux qui étaient là avant, autant d’in memoriam, de signes, de messages et de « fleurs ». Et les Trois Esquisses de Heinz Holliger, par l’accord de leurs instruments, font écho à la Symphonie concertante de Mozart.