György Kurtág
Salvatore Sciarrino  

[Musique]
György Kurtág et Salvatore Sciarrino partagent un même sens, profond, de la forme. À l’un, la concentration tenant l’existence dans un souffle ; à l’autre, la suspension et l’attente inquiète du son. Et, commune, la tension de marcher sur le fil du silence et de l’infime.
Les Messages de feu Demoiselle R. V. Troussova, qui établirent sa renommée en Europe occidentale mais dont les exécutions en concert sont rares, et …quasi una fantasia… témoignent de l’art somptueux de György Kurtág. L’intensité de ces Messages et leur concision dénotent une absence, un rêve, une ombre ou un deuil, en une forme concentrée à un si haut degré qu’elle ne saurait supporter de trop longs développements. Toujours, le musicien se met à la recherche de l’essence, une essence nue, aux contours terriblement précis. Kurtág aime à citer le poète hongrois Attila József : « Les structures de branches dépouillées soutiennent l’air vide ». Alors le jeu de la soustraction reflète un monde disloqué, entre une forme et un destin.
En regard, Salvatore Sciarrino, qui voit en Kurtág un compositeur de la sincérité, rend hommage à deux de ses maîtres, l’un ancien et l’autre moderne. À Alberto Burri, né à Città di Castello, en Ombrie, où réside Sciarrino, à ses Neri (Noirs) ou à ses crevasses blanches (Cretti), dont l’enseignement tiendrait à ceci : « Quand je regarde un long moment le blanc ou le noir, je vois la même chose ». Au cruel Carlo Gesualdo, dont l’histoire retient qu’il assassina son épouse infidèle. Dans son œuvre, aux accents noueux, aux dissonances et aux rythmes inconstants, Sciarrino s’immisce à la manière de Borges et y inscrit une autre logique. Et après plusieurs sonates et de virtuoses parties dans des œuvres instrumentales et vocales, Sciarrino livre enfin une nouvelle composition pour piano et ensemble.
 

Public aveugle et malvoyant : Concert naturellement accessible