Pierre Boulez Pli selon pli

[Musique]

Apogée de la première période créatrice de Boulez, Pli selon pli réalise, selon le voeu du compositeur, un « portrait musical de Mallarmé », dépliant l’oeuvre du poète depuis ses sonnets jusqu’au projet monumental du « Livre ». Ici poésie et musique « tressent leur sève ensemble » (Char) selon un double principe de coïncidence de structures et de convergence d’idéaux. Le cycle est, comme souvent chez le compositeur, le fruit de multiples remaniements, adjonctions et modulation de
composants par ailleurs autonomes, par plis successifs s’étalant depuis 1957 jusqu’à 1989.
Sous sa forme cristallisée, il s’ouvre et se clôt sur deux pièces majoritairement orchestrales (« Don » et « Tombeau ») entre lesquelles s’insèrent trois « Improvisations » à partir de sonnets mallarméens. L’amplitude de la forme globale permet au langage de Boulez de se déployer dans une temporalité étendue, opposant au « temps strié » de la formule ramassée le « temps lisse » de la suspension, tandis que, à l’avant-plan de l’orchestration, les instruments à résonance (percussion à clavier, harpe, piano) charrient la rémanence lointaine des orchestres de gamelan. En se réfléchissant dans la poésie de Mallarmé, la musique de Boulez révèle (paradoxalement) la pureté de son langage.