Francois Tanguy Fragments forains

[Théâtre]

A Wilhem Büchner
Strasbourg, le 2 septembre 1836
(...) Je suis tout à fait content dans mon coin, sauf quand nous avons une pluie qui n'en finit pas et le vent de nord-ouest, auquel cas je deviens l'un de ces gens qui, le soir, au moment de se coucher, quand ils ont ôté une chaussette, sont capables de se pendre à la porte de leur chambre parce qu'ils trouvent trop pénible d'ôter aussi l'autre (...). Je ne fais plus maintenant que dans l'étude des sciences naturelles et de la philosophie, et je partirai sous pour Zurich et, en ma qualité de membre superflu de la société, j'y donnerai à mes semblables des cours magistraux sur quelque chose d'également on ne peut plus superflu, à savoir les systèmes philosophiques des Allemands depuis Descartes et Spinoza...
En même temps, je suis en train de faire s'occire ou s'épouser sur le papier quelques êtres humains, et je prie le Bon Dieu de trouver un libraire simplet et un grand public avec aussi peu de goût que possible. Il y a décidément beaucoup de choses sous le soleil qui demandent du courage, même d'être chargé de cours de philosophie. (...)
Georg Büchner, Oeuvres complètes
Traduction de Bernard Lortholary
Ed. du Seuil