Francois Tanguy Choral

[Théâtre]

Rien qu'un mot. Rien qu'une prière. Rien qu'un mouvement de l'air. Rien qu'une preuve que tu vis encore et attends. Non pas une prière, rien qu'un souffle, pas un souffle, rien que de la bonne volonté, pas de bonne volonté, rien qu'une pensée, pas une pensée, rien qu'un sommeil paisible.
Franz Kafka
Un choral... La langue en lambeaux plus que jamais revient de loin, du silence des morts sans doute, infimes bouffées, murmures informes, tendresse offerte aux agonisants. Les hommes en habits et chapeaux noirs, les femmes vêtues de robes aux blancs cassés, vont et viennent s'assoient sur les chaises dépareillées, sortent, reviennent, ne veille aucun corps. Ils veillent tout simplement. Maintiennent le feu dans la nuit... S'attardent, halte précaire... Entre deux fragments. Franz Kafka s'interroge : "Comment puis-je espérer souder des morceaux pour en faire une histoire vibrante". Veilleuses de nuit, les faibles loupiotes de Choral tiennent lieu d'arc à souder tandis que l'informel ballet des cadres et le petit rideau de cuisine bientôt tendu dans le campement font office de passe-plat. Alors l'homme peut disparaître en un tour de main, s'adonner au sketch increvable et clownesque de l'armoire que l'on déménage et qui vous ballotte comme un canot ou, l'air de ne pas y toucher, marcher sur ses mains, tenir en équilibre sur son faux nez le bord de son chapeau. Il sera toujours temps plus tard de saluer les artistes.
Jean Pierre Thibaudat