Berlin

Bonanza

[Cinéma]

Bonanza… hameau de cinq maisons lové aux creux des montagnes du Colorado. Un microcosme idyllique, résumé sur une maquette de sept mètres sur trois et cinq écrans. Tranquille, en apparence. Lentement fissuré au fil tranchant des conversations des sept habitants, miné par les ragots, les rancœurs, les alliances et les haines irréductibles. Un monde miniature donc...
C’est en glissant par les anfractuosités des villes que le jeune collectif anversois Berlin trame une histoire de notre époque. En 2003, Yves Degryse et Caroline Rochlitz, tous deux passés par une école de théâtre, et Bart Baele, vidéaste, lançaient le projet Holocène [notre époque géologique], série de portraits de villes. Durant plusieurs mois, le trio s’immerge dans un territoire, mène l’enquête, recueille patiemment les paroles des habitants pour découvrir peu à peu le paysage, en comprendre les lignes de fracture, les couleurs singulières… le cadastre secret. Après Bonanza, il a exploré Jérusalem, puis Iqaluit, capitale inuit de cinq mille âmes au nord du Canada. Aujourd’hui, il revient de Moscou, mégalopole foisonnante de dix millions de personnes. À rebours d’une approche journalistique, Berlin met en scène ces matériaux documentaires et invente chaque fois un dispositif de représentation particulier, propre à l’identité de la ville. Comme s’il fallait en passer par la fiction pour dévoiler une réalité du monde, irréductiblement plurielle, incertaine.