Shiro Maeda Suteru Tabi

[Théâtre]

L’espace de la scène est presque aussi étroit qu’une chambre à coucher. Quatre chaises, quelques objets, il n’en faut pas plus pour installer une dramaturgie des plus insolites où le corps de l’acteur joue un rôle essentiel par sa capacité à se transformer, à devenir autre.
Dans Suteru Tabi, Shiro Maeda (auteur et metteur en scène né en 1977, fondateur à Tokyo de la compagnie GOTANNDADAN), invente sur un mode plutôt ludique et souvent drôle un rituel imaginatif en forme de thérapie. Sachant qu’en japonais « suteru » signifie « se débarrasser de » et « tabi » veut dire « voyage », ce à quoi nous confronte ce spectacle n’est autre que le voyage intérieur entrepris par un jeune homme éprouvé par la mort récente de son père.
Pour faire le deuil de cette disparition, il doit se livrer à un rituel d’autant plus touchant qu’il y est aidé par ses proches. Pénétrant dans un univers parallèle foisonnant d’images où les acteurs se transforment en êtres mythiques, plantes ou animaux, le héros tourmenté affronte une série d’épreuves. C’est comme s’il était convié à traverser différents états mentaux, jusqu’à mourir pour pouvoir mieux renaître. Cela tient du rituel sauvage et du jeu d’enfant, comme si Shiro Maeda, qui participe lui-même au spectacle, s’amusait à inventer un parcours initiatique semé d’embûches mais non dépourvu d’humour ; cela avec des moyens de fortune mais aussi une capacité étonnante à basculer dans un monde poétique où réel et imaginaire co-existent sur un même plan. Une belle démonstration du pouvoir de l’imagination.