Clara Iannotta
Pierre-Yves Macé
Helmut Lachenmann

[Musique]

Un son de cloche, des bribes de musiques de rue, des accords et des résonances : voilà les objets trouvés qui composent ce concert, à l’allure de paysage.

« J’aimais, écrit Rimbaud, les peintures idiotes, dessus de portes, décors, toiles de saltimbanques, enseignes, enluminures populaires ; la littérature démodée, latin d’église, livres érotiques sans orthographe, romans de nos aïeules, contes de fées, petits livres de l’enfance, opéras vieux, refrains niais, rythmes naïfs ». L’objet trouvé, un bruit, un éclat de voix, un fragment mélodique devant lesquels l’artiste tombe en arrêt, ouvre l’une des voies royales de l’art contemporain. Il peut rester là comme une discordance ou au contraire être intégré, voire dissous.
Chez Clara Iannotta, c’est le son d’une cloche, celle de la cathédrale de Fribourg-en-Brisgau, qui suscite une trame instrumentale subtile, évoquant « l’expérience de cette écoute – l’attente, le carillon, la mémoire et le silence. La traversée de différents carillons rythmiques, composés de sons complexes, génère des figures et gestes qui ne trouvent leurs résolutions que dans la répétition même ».
Pierre-Yves Macé élabore quant à lui toute une esthétique du recyclage musical, « une forme de citation qui altère substantiellement la physionomie du matériau premier ». Dans Rumorarium, des musiques de rue enregistrées sont rejouées à partir d’un échantillonneur à clavier, soumis à « des cuts, des répétitions, des alliages de couleurs », donnant tout un « vivarium de rumeurs ».
Chez le compositeur allemand Helmut Lachenmann, le reprise s’effectue de manière plus abstraite : il ne s’agit plus seulement de faire de la musique avec des bruits instrumentaux, mais de prendre comme objet des figures rythmiques typées, des accords, des résonances, « pour éclairer de manière nouvelle tout ce qui résonne et tout ce que le son met en mouvement dans un contexte différent ». Là aussi, l’image du lieu d’écoute est essentielle : Concertini évoque une traversée, « des égarements, si l’on veut, au sein d’un labyrinthe qu’on a soi-même construit et qui est placé cependant à l’intérieur d’une grille temporelle stricte – que l’on traversera comme un sourcier ».

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Durée : 1h20 plus entracte
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