Toshiki Okada Five days in March

Toshiki Okada

[Théâtre]

Avec sa compagnie Chelfitsch, Toshiki Okada s’emploie depuis 1997 à porter sur scène la réalité du Japon contemporain.
Ses spectacles donnent une voix à cette jeune génération que la presse japonaise a pu qualifier de « génération perdue » : ces 25-35 ans en proie à la précarité, qui se sont inventé un nouveau langage pour pallier leur absence croissante de repères dans une société sclérosée, parcourue de tensions.
Entre théâtre et danse, naturalisme et abstraction, les spectacles d’Okada donnent des contours singuliers à ces identités floues et vacillantes. Les corps sont comme empesés, contraints, et en même temps étonnamment diserts ; les points de vue et les hypothèses, passant d’un personnage à l’autre, s’accumulent comme autant de strates d’un présent difficilement représentable.
Okada chorégraphie un quotidien qu’il s’emploie, dans le même mouvement, à restituer dans toute sa trivialité, notamment langagière.
Les deux pièces présentées par le Festival d’Automne, le Théâtre2Gennevilliers et le Cent Quatre mettent en scène un temps suspendu, vertigineusement ancré dans le présent.
Dans Five Days In March, l’espace de cinq nuits dans un love hotel en mars 2003, tandis que se déroulent au Japon les manifestations contre l’invasion américaine
en Irak, sept acteurs-danseurs se relaient pour « raconter », joignant les gestes à la parole, leurs histoires de couple et leur engagement politique.

Avec Free Time, sa dernière création en date, Toshiki Okada prolonge la veine de sa pièce Enjoy, consacrée aux freeters (ces personnes sans profession stable) : c’est une réflexion sur le travail et la liberté, abordés cette fois à travers des jeunes gens qui ne travaillent pas… Précisément chorégraphiés, d’une rigueur formelle et d’un sens du détail étonnants, les spectacles d’Okada semblent pourtant totalement dénués d’artifices : ainsi, ces successions d’images saisissantes et d’une bouleversante humanité deviennent non seulement terriblement contemporaines, mais aussi parfaitement universelles.