Rodolphe Dana / Collectif Les Possédés Bullet Park

d’après John Cheever

[Théâtre]

L’aseptisation des banlieues américaines et la vie parfois lyophilisée qui en émane ont suscité un engouement artistique certain depuis l’avènement de la middle class au début des années 1960. Avant les romans de John Updike ou Richard Yates, avant les photographies de Gregory Crewdson et la série au succès mondial Desperate Housewives, l’auteur John Cheever avait déjà révélé les mystifications de cette forme particulière de l’« American Way of Life ».
Passion électroménagère, moeurs de voisinage et autres indices d’oppression domestique forment ainsi la toile de fond de Bullet Park (1969), quatrième roman de l’auteur construit selon un mouvement decrescendo : avec la causticité propre aux grands auteurs américains, Cheever peint le quotidien sucré et pavillonnaire de la famille Nailles… avant de craqueler le vernis du tableau pour dévoiler existences au point mort et flottements des êtres. « La banlieue », écrivait John Cheever à propos de ce drame en huis clos, « cadre d’un grand nombre de mes nouvelles, reflète l’agitation, le déracinement propres à la vie moderne. C’est un mode de vie qu’il a fallu improviser. Il n’y avait pas de traditions de la banlieue.
Les gens ont dû apprendre à vivre ensemble et à fonder une nouvelle société. » Le Collectif Les Possédés explore ainsi les gouffres d’une société capitaliste trop policée pour tenir debout.